J'ai évoqué dans un autre billet les correspondances entre musique et architecture, entre les structures dans le temps et dans l'espace, entre les fugues et les cathédrales...
Bachelard disait en substance que dans une maison sans recoins, sans lieux cachés et obscurs, point de rêverie possible. Puisque la musique ne peut exister sans rêverie, se pose donc la question du coin, du recoin musical...
La musique ne se contente pas de s'étirer dans le temps, d'étirer le temps, elle s'y plie, s'y replie. La musique est comme un pli du temps, un origami de durées.
Le philosophe Gilles Deleuze l'évoque dans son mythique Abécédaire, et développe ce concept du pli, en particulier dans Le pli, Leibnitz et le Baroque...

Pour illustrer ce riche concept de pli musical, voici une très belle animation autour d'un canon cancrizans de Bach et d'un ruban de Moëbius


J.S. Bach - Crab Canon on a Möbius Strip

Et puisque qu'on parle de ruban, de Bach, de pli, de philosophie... il faut citer LA bible en la matière, le livre de Douglas Hofstadter Gödel, Escher, Bach : les brins d'une guirlande éternelle (Prix Pulitzer 1979), construction virtuose et réjouissante, qui mêle et démêle les constructions musicales, graphiques et logiques avec une érudition et un plaisir communicatifs. Ceux qui veulent s'approcher de ce pavé peuvent faire un détour par le blog éclectique, ou (pour les motivés anglophones), suivre des conférences du MIT dédiées à GEB (Gödel, Escher, Bach).